quelle avenir pour La France?
A l’occasion de l’annonce du départ de Tony Blair, Jean-Marc Four*, correspondant à Londres de Radio France de 2002 à 2006 répond à nos questions.
Qu’est-ce qui a fait avancer Tony Blair dix ans durant?
Il est profondément convaincu de ce qu’il dit. Et, plus il a avancé, plus il a cru en ce qu’il faisait. Il a un côté un peu messianique. Et puis il aime le pouvoir, donc il a tout fait pour y rester.
Que restera-t-il de la personnalité de Tony Blair?
Il est drôle et vif d’esprit. La presse britannique l’a surnommé «Bambi», à cause de ses yeux de faon. Son autre surnom est «teflon», car il résiste très bien aux coups. Les attaques glissent sur lui sans avoir prise. Il est convaincu de ce qu’il dit, sans être agressif, et il est très pragmatique.
Mais, lui et son entourage ont fini par croire qu’ils avaient raison par définition. Ils pensaient que la guerre en Irak était une bonne action, qu’ils ont cherché à justifier par tous les moyens, y compris en déformant la réalité. Ce n’était d’ailleurs pas du suivisme vis-à-vis des Etats-Unis. Il voulait vraiment y aller.
Vous définissez sa politique, le blairisme, comme inclassable. Pourquoi?
Tony Blair a opéré un recentrage du parti travailliste, en prenant des idées à droite et à gauche. Sa logique économique consiste à favoriser les grandes entreprises pour créer des emplois. Son traitement du chômage est néolibéral. Et sa politique sur la délinquance est à dominante répressive.
Mais d’un autre côté, il a investi massivement dans les services publics. Il a également mis en place un salaire minimum qui n’existait pas jusqu’alors en Grande-Bretagne. On peut aussi mettre à son actif la légalisation du mariage homosexuel, la dépénalisation du cannabis ou la création d’un congé paternité.
Qu’est-ce que l’on retiendra de ses dix ans au pouvoir?
La prospérité économique, la paix en Irlande du Nord et l’erreur de la guerre en Irak. Mais le gros point noir, ce sont les retraites. Le système de financement fonctionnait sur les entreprises et il a explosé. C’est une catastrophe.
Dans quel état laisse-t-il le parti à son successeur, sans doute l’actuel ministre des Finances Gordon Brown?
Le parti travailliste a un peu épuisé son programme. Il leur faut trouver de nouvelles idées en matière d’environnement par exemple, ou dans le développement de la recherche et des technologies. Ils n’ont pas non plus été au bout sur leur thème de départ, l’éducation. Leur positionnement idéologique est aussi un point important. Vont-ils faire pencher le balancier plus à gauche ou continuer sur leur lancée? D’un autre côté, le parti a été renouvelé avec l’arrivée de jeunes cadres. Mais cela ne déplairait pas à Tony Blair de rester dans l’histoire comme le grand Premier ministre travailliste.
Quelle relation Tony Blair entretient-il avec Gordon Brown?
C’est une rivalité shakespearienne. Ce sont deux amis, deux frères qui s’aiment et se détestent. Ils sont nés en politique ensemble et sont proches idéologiquement. Mais comme partout ailleurs, il y a des querelles de familles. Gordon Brown, l’intellectuel ténébreux, n’a pas supporté que Tony Blair, le petit frère charismatique, lui fasse de l’ombre.
*Auteur de «Tony Blair, l’iconoclaste. Un modèle à suivre?» , de Jean-Marc Four, éditions Lignes de repères, 174 p., 16 euros.
Propos recueillis par Tristan Delamotte
20Minutes.fr, éditions du 09/05/2007 – 19h02
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